À l’heure où les
enfants prennent leur envol et s’évadent du cocon familial. À l’heure où ils
entament la troisième décade de leur vie, la plus belle, celle où tout est
permis, où tout semble possible. Comment, dans ce monde incertain, ne pas se
soucier de ce que seront leurs univers, leurs vies, leurs peines, leurs joies, leur
rapport avec le monde, leurs voisins, leurs amis, leurs collègues.
Je pense alors à John
Lennon lorsqu’ il a dit : « Quand
j’avais 5 ans, ma mère me disait que le bonheur était la clé de la vie. À
l’école, ils m’ont demandé ce que je voulais être quand je serai grand. J’ai répondu
"heureux". Ils m’ont dit que je n’avais pas compris la question. J’ai
répondu qu’ils ne comprenaient pas la vie ».
Et je me prends
à rêver. À rêver d’un monde où il est réellement possible d’être heureux, au
lieu de vies faites d’une succession d’éphémères jubilations et d’une enfilade
d’interminables épreuves.
Je me prends à
rêver d’un monde où les gens s’aiment, les voisins s’entraident, les citoyens
se soutiennent.
Un monde où il n’y
a ni pauvres, ni riches, juste des gens qui vivent bien.
Un monde où les
cœurs ignorent l’égoïsme, l’orgueil et l’envie, où les âmes sont trempées dans
l’altruisme, l’humilité et l’empathie.
Un monde où la
religion n’est plus facteur de division entre les hommes, mais un puissant
aimant d’attraction entre les âmes.
Un monde où les
lieux de travail ne sont pas des coupe-gorge, des endroits de maltraitance
mentale, mais des espaces de fraternité et d’entraide.
Un monde où
jamais un homme n’agresse un autre homme, pas plus qu’il ne violente sa femme,
ses enfants, ses prochains.
Un monde où pas
un enfant n’erre seul dans les rues, aucun adulte ne tend la main pour survivre,
nulle femme n’échange son corps pour sa pitance quotidienne.
Un monde où les
théâtres de guerre ont cédé la place à des élysées éternels. Où les milliards du
complexe militaro-industriel, destinés à flatter l’ego des nations, servir leurs
politiques impérialistes, et enrichir les lobbies d’affaires, au prix de
millions de vies sacrifiées, que ces milliards financent une autre guerre,
celle menée contre la pauvreté, pour l’amélioration des vies de milliards de démunis.
Je me prends à rêver
du monde de Thomas Jefferson quand, en 1776, il avait inscrit dans la
déclaration d'indépendance des États-Unis : « Tous les hommes naissent égaux, leur créateur les a dotés de certains
droits inaliénables, parmi lesquels figurent la vie, la liberté et la recherche
du bonheur. »
Je rêve du monde de ce père fondateur des nations modernes pour lequel
« Les gouvernements sont établis parmi les hommes pour garantir ces droits
et leur juste pouvoir émane du consentement des gouvernés. Si un gouvernement,
quelle qu’en soit la forme, vient à méconnaître ces fins, le peuple a le droit
de le modifier ou de l’abolir et d’instituer un nouveau gouvernement ».
Je me prends à
rêver d’un monde où les individus valent ce que valent leurs contributions au
bien-être de leurs communautés, et non discriminés en raison de la couleur de
leur peau, leur origine ethnique, leur religion, leur sexe, leur position
sociale.
Un monde où règne
« Peace and love », credo qui a baigné la jeunesse des sixties, qu’il
serait inepte de prendre pour une vieille histoire d’illuminés. « Peace
and love » est une aspiration éternelle. Le bonheur n’est possible que dans
un monde apaisé, où chacun répand l’amour autour de lui.
Propos bien naïfs,
certes. Mais qui libèrent du cynisme régnant et nourrissent les rêves. Des rêves
qui fermentent les grands desseins. Les seuls qui impactent les destinées humaines.
Alors, pour
débarbouiller de couleurs l’affligeante grisaille de la réalité, je continuerai
à puiser avec mes pinceaux dans la palette de l’arc en ciel de l’utopie, et à peindre
un monde où les hommes accèdent enfin à leur droit au bonheur.
À moins que la félicité
ne soit point de ce monde.
Rida Lamrini 06 février 2013
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