samedi 15 février 2025

AUX PORTES DES ETOILES : Note de lecture de Jade Bounouas _ Maroc Hebdo - 2/2

 MAROC-HEBDO

«Aux portes des étoiles» de Rida Lamrini : A la recherche du parent perdu

«Aux portes des étoiles», publié en décembre 2024 par Rida Lamrini, relate la quête obsessionnelle de Salim, chercheur en infectiologie, déterminé à retrouver son père, Rayan, disparu dans un vol dont on n’a jamais retrouvé la trace.

Par Jade Abanouas
Publié le 14 février 2025 à 11:28. | 3 min de lecture






vendredi 14 février 2025

AUX PORTES DES ETOILES : Note de lecture de Jade Bounouas de Maroc Hebdo - 1/2

 MAROC-HEBDO

«Aux portes des étoiles» de Rida Lamrini : A la recherche du parent perdu

«Aux portes des étoiles», publié en décembre 2024 par Rida Lamrini, relate la quête obsessionnelle de Salim, chercheur en infectiologie, déterminé à retrouver son père, Rayan, disparu dans un vol dont on n’a jamais retrouvé la trace.

Par Jade Abanouas
Publié le 14 février 2025 à 11:28. | 3 min de lecture


Le roman « Aux portes des étoiles » est écrit par Rida Lamrini et publié aux éditions Afrique Orient. L’ouvrage se veut une quête existentielle et filiale, une méditation sur le pardon et la mémoire. On y suit les « pérégrinations » d’un jeune chercheur en infectiologie, Salim, qui n’a qu’un but : retrouver son père, disparu dans un vol qui n’a laissé aucune trace. Ce père, Rayan, était docteur en génétique et en immunologie, admiré de tous. Son mariage fut un échec. Sa femme, après l’avoir quitté, lui intente un procès, moins par ressentiment que par intérêt, déterminée à s’approprier une part de ses biens. Dévoré de jalousie, accablé par des rancœurs domestiques, il eut une existence contrariée, dont il se consola en multipliant les conquêtes, car il savait plaire aux femmes. Il a laissé derrière lui un roman inachevé, dont son fils écrit le dernier chapitre sous une sorte d’inspiration quasi mystique, et que tout le monde s’accorde à trouver très beau.

Ce chapitre, litanie du pardon et réconciliation posthume, lui donne l’illusion d’un dialogue retrouvé et ravive son obsession de retrouver son père, qu’on dit mort mais dont il refuse d’accepter la disparition, persuadé qu’une vérité lui échappe encore. Rongé par le remords de l’avoir délaissé, il veut réparer son erreur, pénétrer l’énigme de cette absence, et honorer sa mémoire. Il s’ensuit alors une recherche sans trêve. Le héros rassemble témoignages, indices, coupures de journaux, et peu à peu les signes se recoupent, la certitude s’impose : le père n’a jamais pris le funeste avion, mais a décidé de disparaître sans tenir personne au courant. Les deux hommes se retrouvent enfin. Durant cette quête Salim est tout entier absorbé par son malheur. Il parle peu, mais soupire beaucoup. Il est triste et sérieux. Il réprime souvent des sanglots, et à tout moment sa voix menace de se briser. Il souffre sans se laisser distraire – sauf lorsque le chagrin le cède aux appétits terrestres. Car fort heureusement, il reste homme, et la douleur, si envahissante soit-elle, connaît des accalmies. Il lui arrive de détourner le regard de son abîme intérieur pour s’attarder sur un joli décolleté, sur la courbe d’une hanche, sur une belle chevelure rousse, sur un sourire de femme un peu appuyé. La mort l’obsède mais la chair l’attendrit.

Décrypter le génome
Les femmes qu’il croise, Florence d’abord, puis Emilie, semblent étrangement fascinées par lui. Est-ce son intelligence ? Son mystère ? Son talent d’écrivain, unanimement salué et dont plus personne ne doute après qu’il a écrit trois pages et demi au bord d’un lac ? Le roman ne nous l’apprend pas ; mais elles tombent promptement sous son charme ; il est vrai qu’un homme qui ne parle que de son père disparu et de ses tourments existentiels possède sans doute un magnétisme insoupçonné. Qu’importe, elles l’écoutent, le soutiennent, l’admirent, lui ouvrent vite et les bras et les jambes. Mais les conversations s’élargissent bientôt et la liaison avec Émilie donne lieu, entre amoureux, à des échanges de courrier intéressants sur la philosophie et la science. Le héros daigne alors s’ouvrir sur ce qui fut, avant l’obsession du père, sa passion première: comprendre. Car de bonne heure, il a voulu décrypter le génome et forcer la vie à livrer son secret. Le style est réduit à l’essentiel. Les phrases sont courtes, directes, télégraphiques. Il y a une économie extrême des moyens: peu de subordination, peu d’effets de rythme, une syntaxe fonctionnelle qui avance par petites saccades. L’effet est celui d’un récit qui progresse par à-coups, et l’on avance comme on monte un escalier un peu raide. L’usage systématique du présent de narration est curieux, il confère une immédiateté apparente. Mais s’il manque de liant, le texte va droit au but.