mercredi 30 janvier 2013

The Lady



« Ce n’est pas le pouvoir qui corrompt, mais la peur : la peur de perdre le pouvoir pour ceux qui l’exercent, et la peur des matraques pour ceux que le pouvoir opprime.
(…) Dans sa forme la plus insidieuse, la peur prend le masque du bon sens, voire de la sagesse, en condamnant comme insensés, imprudents, inefficaces ou inutiles les petits gestes quotidiens de courage qui aident à préserver respect de soi et dignité humaine. (...) Dans un système qui dénie l’existence des droits humains fondamentaux, la peur tend à faire partie de l’ordre des choses. Mais aucune machinerie d’État, fût-elle la plus écrasante, ne peut empêcher le courage de ressurgir encore et toujours, car la peur n’est pas l’élément naturel de l’homme civilisé. »[i]
Le souffle, la lucidité, l’humanisme des propos laissent imaginer on ne sait quelle force de la nature derrière ce texte ! Ils émanent en fait d’une femme d’allure frêle, qui rayonne en permanence de paix et de quiétude. Peut-être est-ce pour cela qu’on l’appelle le « Papillon de fer ».
Nul ne pouvait imaginer la fortune que sa vie allait connaître. Née avec une cuillère d’or dans la bouche, issue d’une lignée de parents illustres, tout la prédestinait à jouer les tout premiers rôles dans sa société.
Elle quitte sa Birmanie natale où elle a vu le jour à la fin de la seconde guerre mondiale, et part pour ses études secondaires en Grande-Bretagne. Elle y suit un cursus de philosophie, politique et économie au prestigieux St Hugh’s College d’Oxford. Elle termine ses études par un doctorat (Ph.D) à la School of Oriental and African Studies (SOAS) de Londres. À 22 ans, elle entame un second cycle d’études supérieures à New York. Elle devient secrétaire-assistante du Comité des questions administratives et budgétaires des Nations unies. Elle rencontre son mari à Oxford alors qu’il étudiait les civilisations tibétaines. Elle lui donne deux garçons et… ils auraient pu vivre heureux et avoir beaucoup d’enfants…
Ils auraient pu…
Au lieu de cela, elle choisit un tout autre cours de vie.
Elle retourne en Birmanie pour s’occuper de sa mère vieillissante. Le destin frappe ce jour-là à sa porte. L’armée jette une chape de plomb sur son pays. De violentes répressions frappent les manifestations pro-démocratiques.
Que faire ? Retourner à l’air libre de Londres, retrouver le confort de son foyer, et se lamenter de loin sur le malheur des siens ? Adepte de la philosophie non violente du Mahatma Gandhi, elle entre en politique. Et quelle politique ! Pas celle de la course après les privilèges. Pas celle des discours creux qui mènent vers le pouvoir. Pas celle avide des avantages réservés à une minorité.
Abandonnant mari, enfants et famille, elle s’engage sans concession pour la démocratisation de son pays. Au prix de sa liberté personnelle. Loin des siens et de ses proches. À la clé, des années de résidence surveillée, des contacts rompus, une vie d’isolation. Elle refuse les offres alléchantes, pour peu qu’elle abandonne un combat perdu d’avance, une lutte inégale avec des dictateurs déterminés.
Une belle leçon de vie. Donnée par une femme à laquelle la vie a tout donné. Qui n’avait besoin que d’y croquer. Et qui, au lieu de cela, a fourni un rare exemple du politique, mot auquel elle a donné un lustre à la mesure de son sacrifice, à la hauteur de son opiniâtreté. Et l’on se prend à aimer la politique. Et l’on retrouve du sens à l’engagement. Et l’on reprend confiance en l’humain. Et l’on se sent animé de l’envie de la suivre. Et l’on succombe au charisme du leader tant attendu. Et elle nous fait revivre ces époques de nos vies marquées par le sacrifice et l’abnégation des géants de l’Histoire.
Elle est… The Lady of Rangoon.

Rida Lamrini - 30 Janvier 2013

[i] Libérez-nous de la peur (Freedom from Fear), Discours d’Aung San Suu Kyi, femme politique birmane, figure de l’opposition non violente à la dictature militaire de son pays, lauréate du prix Nobel de la paix en 1991.

dimanche 27 janvier 2013

Tribulations d’un cycliste en ville


Ce matin, alors que je m’apprête à sortir de chez moi pour ma randonnée habituelle en vélo, j’aperçois mon voisin tenter vainement de quitter son garage. Le malheureux n’arrive pas à s’insérer dans la colonne de voitures qui défile dans notre rue. Un conducteur exceptionnellement aimable finit par ralentir et s’arrêter, lui permettant de s’engouffrer dans le flot. Mon voisin se fond en remerciements à l’égard du gentleman providentiel, et en louanges au Ciel, puis s’engage dans la noria de voitures.
J’enfourche mon vélo, impatient d’aller pédaler gaîment dans les rues de la ville. J’arrive à un feu et patiente qu’il passe au vert. Je suis surpris de voir mon voisin à ma hauteur. Je jubile. Au fond, le vélo et la voiture en ville, c’est un peu l’histoire du lièvre et de la tortue. Nous nous sourions. Une bordée de klaxons déchire l’atmosphère, signe que le feu vient de passer au vert. Je plains mon voisin. Je devine qu’il est en train d’enclencher la première, moment redouté par tous les conducteurs. Lâchée avant qu’il n’ait eu le temps d’embrayer, la bordée de klaxons lui était destinée. Apparemment, il ne démarre pas assez vite pour les conducteurs de ma cité. J’ai bien peur qu’aucun être humain ne le sera suffisamment pour eux.
Prudemment, je m’engage dans le croisement. Mal m’en a pris. Un chauffard déboule de ma droite et un cyclomoteur surgit de ma gauche. Je m’arrête net, évitant de me faire écraser. Plus loin, je tombe sur un bouchon. Les voitures sont prises d’assaut par des mendiants aux conditions douteuses, et des vendeurs particulièrement collants qui proposent mouchoirs en papier et autres babioles. Mes oreilles supportent mal la cacophonie des avertisseurs. Le policier est submergé. Ses coups de sifflets sont stridents, mais bien inutiles. Rien ne bouge. Spectacle surréaliste.
Bien que moins incommodé qu’un automobiliste, je peste contre la circulation. Elle ne fait qu’empirer. Chaque jour, le parc de voitures augmente. Chaque jour, la ville étouffe davantage. Rouler met les nerfs à rude épreuve. Il faut rester sur ses gardes, regarder à gauche, à droite, devant, derrière ! L’imprévisible peut jaillir à tout instant ! Mes concitoyens, d’habitude pacifiques, sont méconnaissables derrière le volant. Même nos douces moitiés transcendent leur tendresse génétique et se métamorphosent en ogresses ! Mais qui gère donc notre cité ? Qui en planifie le développement ? Qui répond de sa gestion ? J’ai bien peur que mes questions ne restent sans réponses.
J’arrive à l’un des rares endroits de la ville où un couloir est réservé aux cyclistes. Pas de veine. Il est occupé par des voitures. Les agents de police ne semblent pas considérer cela comme une infraction. Je poursuis ma randonnée, un œil devant, pour surveiller les voitures en stationnement dont les portes s’ouvrent intempestivement, un œil derrière pour éviter les voitures à qui vient l’idée de tourner à droite brusquement et vous envoient sur le trottoir avec une belle queue de poisson.
Arrivé à un quartier résidentiel où je pense pouvoir rouler en paix, je reçois un bout de papier sur la figure. J’ai juste le temps de voir l’individu qui, de l’intérieur de la grosse cylindrée qui vient de me dépasser, m’a pris pour une poubelle et m’a confié son détritus. Je ne peux que fulminer contre le fortuné propriétaire de la belle voiture, resté finalement un sauvage attardé.
À peine remis de ma colère, un taxi termine sa course juste devant moi et débarque son client, m’obligeant à freiner brusquement, évitant de justesse d’être projeté contre lui. Je m’apprête à donner libre cours à ma rage et à ma frustration de cycliste bafoué. Le taxi driver se fend d’un large sourire et me neutralise irrésistiblement avec moult excuses.
Je reprends mon pédalage. J’arrive à hauteur d’un cycliste. Obéissant à une solidarité innée entre amateurs des deux roues, nous nous saluons, échangeons sur nos bécanes respectives, grognons contre les voitures, évoquons les joies du cyclisme. Jusqu’au moment où nos chemins se séparent.
De retour chez moi, j’aperçois mon voisin tentant de garer sa voiture, accompagné par les klaxons d’automobilistes n’affichant aucune envie de patienter qu’il finisse sa manœuvre. Je rentre chez moi, aspirant à me mettre sous la douche. La porte sonne. Je reviens ouvrir. Mon voisin est là.
– Vous pouvez me conseiller pour l’achat d’un vélo ? me demande-t-il.
– Volontiers ! répondis-je avec enthousiasme à l’idée de gagner un nouvel adepte de la petite reine.
Puis, cachant mal son embarras, il ajoute d’une voix basse :
– Vous pouvez m’apprendre à le monter… ?

Rida Lamrini - 23 Janvier 2013

















jeudi 17 janvier 2013

Le temps des incertitudes



Hier encore, ils vivaient dans des demeures. Aujourd’hui, ils n’ont que le ciel pour toit. Ils avaient un foyer. Ils sont devenus des sans-abri. Ils nichaient dans la chaleur du cocon familial. Ils sont livrés aux rigueurs des intempéries. Ils confiaient leur fatigue au confort de leurs litières. Ils n’ont plus que les aspérités d’un sol froid pour accueillir leurs corps épuisés.
Hier encore, ils géraient des biens, administraient des cités, faisaient commerce. Aujourd’hui, ils sont dépourvus, errent sans but, cherchent un refuge. Ils possédaient des fortunes, avaient un statut, étaient entourés. Ils se retrouvent dénués, soudainement esseulés. Ils ne manquaient de rien, disposaient du nécessaire et du superflu, étaient comblés. Ils ont tout perdu, dépendent de la charité d’autrui, sont accablés.
Hier encore, ils vaquaient à leurs occupations, cultivaient leurs champs, dominaient leur monde. Ils sont désormais déroutés, désemparés, écrasés.
Hier encore, ils vivaient en paix, œuvraient dans la tranquillité, dormaient dans la sérénité. Aujourd’hui, ils vivent séparés de leurs proches, errent parmi les inconnus, égarés dans un monde de terreur.
Hier encore, ils se réveillaient avec le soleil levant, cueillaient les fruits de la terre dans la clarté du jour, trouvaient le repos avec la tombée de la nuit. Aujourd’hui, ils se terrent sous le déluge des bombes, fuient les atrocités de la guerre, recherchent désespérément un abri.
Hier encore, ils avaient rejoint leur travail, s’étaient installés dans leurs bureaux, préparés pour une autre journée de labeur. Ils se retrouvèrent piégés dans des tours infernales, et finirent engloutis dans leurs décombres. Ils avaient pris l’avion pour retrouver des proches, régler des affaires, découvrir le monde. Ils se retrouvèrent otages, devinrent prisonniers, et finirent victimes.
Ils s’étaient habitués aux largesses de l’État, à la générosité des gouvernants, aux programmes sociaux. Ils découvrent les mensonges des politiques, la dette nationale abyssale, la vacuité des aides publiques. Ils pensaient être assurés du droit au travail, du pouvoir d’achat, du droit au bonheur. Ils réalisent qu’ils vivent dans un monde factice, bâti sur des chimères, tapissé d’utopies.
Hier encore, ils dirigeaient sans partage, pliaient le monde à leur volonté, décidaient sans conteste. Ils finirent rejetés par tous, bannis dans de lointaines contrées, honnis pour l’éternité. Ils gouvernaient d’une main de fer, muselaient des nations entières, étouffaient des populations jadis fières. Ils terminèrent leurs vies déambulant sur terre, se tapirent au fond des égouts, sombrèrent dans la folie.
Hier encore, ils pensaient s’être installés sur le dôme de l’univers, avoir dominé la terre, asservi l’ordre des hommes. Ils s’aperçoivent que des nations effacées se sont transformées en nouveaux maîtres du jeu, que des pays jadis à la traîne sont devenus des puissances redoutées.  
Hier encore, des êtres désespérés fuyaient la misère de leurs pays. Bravant éléments et adversité, ils n’avaient de cesse que de se ruer vers l’eldorado de l’Occident. Aujourd’hui, tel le reflux des eaux, les natifs de ce même eldorado quittent leurs pays et partent tenter leur chance dans les contrées de misère.
Comme si par une loi implacable, ce qui monte aujourd’hui, doit descendre demain. Ce qui semble acquis éternellement, finit par s’évanouir subitement. Ce qui paraît relever de l’immuable, n’est en fin de compte que mirage insaisissable. Ce qui est du domaine de l’évident, n’est finalement qu’une vue de l’esprit.
Dans ce monde où tout bouge, ou aujourd’hui ne ressemble plus à hier, et encore moins à demain, comment regarder ce qui se passe autour de soi et continuer à vivre avec la « certitude » que cela n’arrive qu’aux autres ? Le temps n’est-il pas arrivé de comprendre les raisons des soubresauts qui agitent le globe et secouent tant de communautés, et d’en tirer les leçons sur comment s’en préserver ? Ou serait-ce une fatalité inexorable à laquelle il est difficile d’échapper ?
À moins que ne soit arrivé le temps des incertitudes, un temps où, par essence, toute « certitude » n’est que vérité fugace.

Rida Lamrini  - 16 Janvier 2013

vendredi 11 janvier 2013

Les vents du printemps



Ils étaient des dizaines. Ils étaient des milliers. Ils descendirent dans la rue, durant le printemps. Personne ne les attendait. Personne ne s’y attendait. Tel un volcan dont nul ne soupçonnait l’existence et qui, sans crier gare, s’était mis à vomir des laves menaçantes, les sociétés de la rive sud de la Méditerranée régurgitèrent une progéniture méconnaissable. La jeunesse serait-elle devenue folle ?
Les réseaux sociaux bruissaient. Les parents étaient désemparés. Les politiques déroutés. Les schémas perturbés. Les paradigmes inopérants. Les radars brouillés. Les prévisions démenties. Des vents de liberté inconnus balayaient des contrées longtemps maintenues sous d’épaisses chapes de plombs, attisaient le brasier allumé par des jeunes ordinairement muets. Des générations avides de changement bousculaient des sociétés ensevelies dans des glacis dictatoriaux.
Les effluves chauds exhalés enveloppaient les marches des jeunes d’un trouble angoissant. Les adultes s’inquiétaient du lendemain. Les fortunés s’émouvaient pour leurs acquis. Les puissants tremblaient pour leurs privilèges. Les politiques s’alarmaient pour leurs avantages. Les gens ordinaires priaient pour la quiétude du quotidien. Les petites gens se demandaient de quoi serait fait demain. Les démunis courraient toujours après leur maigre pitance. Les fidèles redoublaient de ferveur dans leurs prières. Les aspirants au changement se félicitaient de cette vague inespérée. Les pêcheurs en eau trouble se tenaient en embuscade. Les opportunistes s’apprêtaient à sauter sur l’aubaine. Les laissés-pour-compte n’y prêtaient pas attention. Les désabusés regardaient ailleurs. Les sceptiques ironisaient. Les idéalistes voyaient leurs rêves se réaliser.
Mais personne ne savait ce que les vents du printemps allaient apporter.
Les jeunes défilèrent dans les rues. Ils crièrent leur désespoir. Ils clamèrent leurs espérances. Ils appelèrent au changement. Ils dénoncèrent les maux du quotidien. Ils stigmatisèrent les responsables de leur quotidien. Ils pointèrent la corruption. Ils condamnèrent l’impunité. Ils rejetèrent la concussion. Ils blâmèrent les malversations. Ils demandèrent la transparence. Ils exigèrent l’équité. Ils réclamèrent la justice. Ils demandèrent l’égalité des chances. Ils requirent la responsabilité. Ils secouèrent les assoupis. Ils prônèrent l’éveil. Ils interpellèrent les politiques. Ils questionnèrent les gouvernants. Ils défendirent la démocratie. Ils mirent les privilèges en question. Ils ne voulaient plus du passé. Ils voulaient un ordre nouveau. Ils aspiraient à un autre lendemain. Ils étaient la nouvelle conscience de leurs sociétés.
Selon le pays, ici on résista, là on plia, ailleurs on réprima. On prêta l’oreille au tollé. On fit la sourde oreille. On tendit la main. On brandit les armes. On toiletta les textes. On jeta du lest. On garda l’essentiel. On utilisa la force. On sacrifia le peuple. On sacrifia des têtes. On classa des têtes. On replaça des têtes. On donna la voix au peuple. On préserva les indispensables. On fit appel à des nouveaux. On mobilisa la force. On offrit des postes. On calma les meneurs. On cassa les meneurs. On casa les leaders. On offrit de l’espace aux ténors. On ouvrit le feu. On déversa les mannes.
Le vent passa. L’orage se calma. La ferveur tomba. Les remous s’apaisèrent. Les rangs se clairsemèrent. Les slogans se turent. Les espoirs s’envolèrent. Les idéaux s’évanouirent. Les idéalistes disparurent. Les politiques survécurent. Les opportunistes récupérèrent. Les outsiders profitèrent. Les futés se posèrent en sauveurs. Les déchus gagnèrent en sainteté. Les caciques retrouvèrent une virginité. Les laudateurs vantèrent la stabilité. Le pouvoir perdura. Le pouvoir changea de main. Les inattendus arrivèrent.
Des années après, à la veille d’un nouveau printemps, est-on sûr d’avoir éteint l’incendie, calmé les ardeurs, répondu aux clameurs, redonné l’espoir, surmonté l’épreuve, tourné la page ? Le feu ne couve-t-il toujours pas sous la cendre ? Les aspirations ne sont-elles toujours pas aussi ardentes ? Les exigences ne sont-elles toujours pas aussi brûlantes ?
Les jeunes redescendront-ils à nouveau dans la rue ? Si d’aventure ils s’y reprenaient, à quoi faut-il s’attendre cette fois-ci ? Les éruptions qui agitent encore les rivages de la Méditerranée seraient-ils des épiphénomènes, ou les signes avant-coureurs d’une lame de fond aux effets bien plus dévastateurs ? Les vents du printemps seraient-ils réellement tombés ?
« The answer my friend is blowin' in the wind » a répondu Bob.  

Rida Lamrini 09 janvier 2013

mardi 1 janvier 2013

La ballade du troubadour



En ces temps où les horizons sont débarbouillés de gris, le souvenir afflue. Dans la salle obscure, la lumière du spot éclaire le rideau rouge. Celui-ci s’ouvre sur un visage rayonnant. Les notes cristallines de sa guitare emplissent l’endroit. Sa voix, chargée d’émotion, s’élève :

Il ne reste plus rien
Que des regrets à vendre
Et le mot de la fin
Qui renaît de ses cendres
Il ne reste plus rien
Qu’une chanson cassée
Qui jette son refrain
Aux larmes du passé
Il ne reste plus rien
Qu’un écho qui insiste
Qui devrait être loin
Mais signe et puis persiste
Reprends ta vie
Et vends la mienne
Aux marchands de hasard

Hymne à l’amour, les mots et les sonorités s’entremêlent dans d’imperceptibles vibrations :

Toi tu nous viens d’ailleurs
Et l’ailleurs te va bien
Ça nous va et d’ailleurs
C’est toi et c’est très bien
Tu viens pas d’un pays
D’une langue d’une loi
De là-bas ou d’ici
Ni rien de tout cela
Encore moins d’un rivage
D’un atoll ou d’un bois
Pas même d’un paysage
Tu viens du fond de toi

Les paroles, portées par une musique aux sonorités envoûtantes, flottent dans l’air, s’infiltrent au plus intime de soi, libèrent des larmes de bonheur. Emporté par la magie, on appréhende le moment où le sortilège viendrait à se rompre.

Je sais que ta vie coule
Comme une plaie ouverte
Je sais que tout s’écroule
Et que t’as dit  «j’arrête»
Je sais que l’innocence
T’as quitté en chemin
Que t’es sûr que la chance
Ça n’est pas ton destin
Mais je voudrais que tu saches
Que les jours de tempête
Les oiseaux sont couchés
En attendant la fête
Du soleil retrouvé
Car le vent de l’espoir finira par souffler
Et tu verras qu’un soir
Tu pourras t’envoler
Où tu voudras

L’assistance est suspendue aux doigts du chantre qui extraient de la guitare des notes rythmées par l’amour et l’espoir :

C’est pour toi que j’écris
C’est pour toi que je chante
Le moindre de mes cris
Prend naissance à ton ventre
Je suis fait comme toi
De doutes et de sourires
D’espérance et de foi
De blessures à venir
Chaque seconde de ma vie
Du bout du monde à l’infini
De chaque larme à chaque joie
A perdre l’âme je pense à toi

Avec sa tendresse à fleur de peau, le poète libère l’amour de chaque vers, de chaque couplet :

Même si quelques fois
L’espoir me fait la gueule
Que je compte sur mes doigts
Combien de jours tout seul
Même si c’est aux murs
Que je parle d’amour
Même si des fois je suis sûr
Qu’espérer n’a plus cours
Moi, j’attendrai
Que le jour se lève
Et je prendrai
Le premier rêve
Moi, j’attendrai
Que le matin
Offre une clé
A mon destin

En ces temps incertains où il fait mal partout ; en ces jours de grisaille où la beauté s’est réfugiée loin de nous ; en ces périodes sans âmes où l’amour et l’espoir ne sont chantés que par des fous ; Malek le troubadour nous emmène dans une ballade où nos sens sont sublimés par la magie des mots et l’enchantement des sonorités.

Rida Lamrini - 26 décembre 2012